La naissance et l'évolution des nouvelles technologies au Japon
Bonsoir !!
Je suis ravi de vous présenter ma deuxième chronique culturelle ; et cette fois on va parler des nouvelles technologies au Japon. Enfin, on va plus s’intéresser à l'évolution de ce secteur au fil des années.
Ce pays est très connu pour ses nombreuses innovations dans ce domaine. Et durant plusieurs années, ses produits innovants et ses grosses marques d'électronique grand public n'arrêtaient pas de fasciner le monde entier.
Mais à partir de 2004, les sociétés japonaises (Canon, Fujitsu, NEC, Panasonic, Sharp, Sony, Toshiba, etc.) ont commencé à perdre du terrain face à la rude concurrence des entreprises étrangères (Acer, Apple, Cisco, HP, Lenovo, LG, Samsung, etc.).
Du coup, on va essayer de répondre aux questions suivantes :
- Comment a fait le Japon afin de gagner une telle marge d'avance en terme de nouvelles technologies ?
- Et quelle est la raison derrière cette baisse de régime aux débuts du 21ème siècle ?
- Finalement, quelles ont été les mesures prises pour faire face à la concurrence ?
le premier livre blanc sur la technologie :
Les dernières années du 20ème siècle ont été marqué par l’émergence de « l'économie du savoir », où l'innovation technologique était la clé du développement et de la croissance dans plusieurs pays.
À la fin de la seconde guerre mondiale, le Japon a changé son objectif du renforcement militaire vers une orientation économique ; en portant un grand intérêt aux avantages sociaux. Par ailleurs, trente-et-un représentants de différentes divisions du ministère du commerce et de l'industrie, l'office des brevets, l'Agence pour les petites et moyennes entreprises, les laboratoires nationaux expérimentaux, et le ministère des transports, avec le soutien de l'agence de la technologie industrielle, ont travaillé ensemble afin de donner naissance au premier livre blanc sur la technologie, appelée « l'état de la technologie industrielle de notre pays ».
Ce livre blanc exprime la grande préoccupation des représentants japonais sur l'avenir et l'importance de la technologie, et contient des propositions pratiques pour améliorer l'industrie japonaise. Il a également entrepris la mission d'éveiller la conscience publique concernant le rôle critique de la technologie dans le développement économique.
Le livre blanc commence par identifier les faiblesses de l'industrie japonaise, qui étaient:
- Le manque de technologies propres au Japon, dû en partie à l'attitude des industriels japonais prévoyant un rendement à court terme et préférant importer de la technologie plutôt que d'investir dans des activités coûteuses de recherches et du développements (R&D).
- Difficulté à traduire les résultats de recherche accumulés dans le milieu universitaire en produits industriels, en raison de l'absence de recherche et du développement appliqués. Ce point a été mentionné comme problème principal du Japon par la Commission académique des États-Unis
- La prédominance des connaissances tacites, des compétences incarnées, astuces et savoir-faire dans le processus de production, en particulier chez les petites et moyennes entreprises (PME), provoquant ainsi une faible productivité de la main-d'œuvre et de longues périodes de formation, et empêchant une diffusion à grande échelle de la technologie.
- La présence de sectionalisme (défense des intérêts de son propre groupe) dans les domaines techniques, qui reflète la structure hiérarchique des disciplines universitaires. La conséquence étant le sous-développement de la technologie, il était nécessaire d'opter pour une approche interdisciplinaire.
Étant conscient de toutes ces faiblesses et dans le contexte d'une concurrence internationale croissante, il devenait urgent pour le Japon de renforcer sa capacité technologique.
Les nouvelles technologies :
(train à sustentation magnétique)
Malgré les efforts du Japon pour développer ses propres technologies, le secteur industriel se concentrait principalement sur l'amélioration de technologies existantes ou importées.
En 1963, le conseil des structures industrielles (fondé en 1961) a recommandé au ministère du commerce international et de l'Industrie (MITI) de mettre en œuvre des projets de recherche ciblés basés sur la coopération « Industrie-Université-Etat », l'objectif étant le développement de technologies innovantes.
Reconnaissant l'innovation technologique comme le facteur clé pour accroître la compétitivité et la croissance économique, le conseil des structures industrielles a présenté dans son rapport intermédiaire (1965), le concept du « Grand projet » :
- Objectifs : développer de nouvelles technologies et de nouveaux produits qui ne seraient pas seulement gérés par le secteur privé en raison du coût et du risque élevés.
- Caractéristiques : investissement à long terme au niveau des chercheurs, des ingénieurs et de l'argent.
- Participation des entreprises privées : sélectionnées en fonction de leur capacité de recherche et leur poids dans le marché.
- Totalement financé par le gouvernement, et mobilisation de la capacité de recherche du secteur privé opérant dans le domaine ciblé.
En 1966, le gouvernement japonais a mis en œuvre son « Système de développement et de recherches industrielles à grande échelle » (i.e. le « Grand projet »), dans le but de soutenir les projets de recherche à long terme, coûteux et risqués, qui ont un grand potentiel d'induire une percée technologique et un impact économique.
Le choix des voies technologiques poursuivies pendant les années 1960 et 1970 a été dicté dans certains cas par les besoins sociaux, tels que la recherche de solutions aux problèmes de la pollution, des embouteillages et des pénuries d'eau, mais la principale force motrice était la nécessité de combler le fossé technologique entre le Japon et les Etats-Unis. Pendant cette période, le Japon avait un modèle pour sa voie technologique, et suite à cela, les entreprises participantes ont renforcé leur base technologique et ont réussi à rattraper les entreprises américaines dans les domaines appropriés.
Dès 1980, le gouvernement japonais a affirmé que sa politique fondamental a pour objectif de devenir « une nation fondée sur la science et la technologie ». Par conséquent, les secteurs de la science, la technologie, l'industrie et de l'enseignement supérieur ont bénéficié d'un ensemble de lois basé sur la coopération de ces derniers.
La situation est devenue plus complexe dans les années 1980, lorsque le Japon a pris les devants au niveau des nouvelles technologies. Et sans modèle à suivre, il devait choisir des voies technologiques à sa manière, ce qui impliquait plus de risque et d'incertitude ; alors la technologie requise est devenue plus complexe et sophistiquée.
Suite à cela, la stratégie de rattrapage a été remplacé par la recherche de technologies innovantes. Cette nouvelle orientation n'impliquait pas seulement le changement des domaines ciblés mais aussi la restructuration du concept du « Grand projet » qui est devenu le point de référence pour le système de recherche japonais. De plus, cela a mis en évidence le problème de compétence suite au manque de coordination des secteurs industriels et académiques, et aussi des différentes organisations responsables de la planification politique en matière de la science et la technologie. Ces derniers concentraient leurs efforts pour obtenir une part de l'allocation budgétaire.
Par conséquent, Les années 1990 ont été souvent appelées « la décennie perdue », en référence à la récession économique prolongée du Japon.
En étant conscient de ce changement primordial, le gouvernement a adopté la « Loi fondamentale des sciences et technologies » en 1995 et a mis en œuvre des mesures politiques pour adapter la gestion et l'organisation de la science et la technologie (S & T). Cette nouvelle loi avait pour but d'équiper le gouvernement d'une base juridique pour changer leur objectif en « nation fondée sur la création de la science et de la technologie », et cela nécessite un engagement coûteux et à long terme de la part du gouvernement.
De 1996 à 2000, un certain nombre de lois et mesures ont été prises, pour renforcer le lien entre l'industrie et les universités. En effet, ces dernières devaient jouer un rôle majeurs, en tant qu'institutions de création du savoir et pour leur fonction de formation, laissant derrière elles leur image de tour d'ivoire.
Le transfert de technologie des universités vers l'industrie :
Les inventions au sein des universités ont été sous-exploitées, et un nombre important de projets de recherche n'ont jamais été finalisés par manque de budget. Par conséquent, en 1998, une nouvelle loi a été promulgué afin de faciliter le transfert technologique des universités à l'industrie (processus désignant le transfert formel à l’industrie de découvertes résultant de la recherche universitaire ou privée dans le but de les commercialiser sous la forme de nouveaux produits).
Alors pour renforcer la coopération du milieu universitaire et des entreprises privés, il fallait encourager l'échange du personnel et le partage des résultats de recherche des deux secteurs (À la fin de Mars 2001, trente-six facultés agissaient en tant que membres du conseil d'administration pour des entreprises privées), et aussi combler l'écart entre la qualité de la formation dispensée par l'université et les attentes du secteur privé.
Toutes ces mesures reposent sur l'idée que les universités doivent être des acteurs dans le système national d'innovation en matière de reconstruction. Et Compte tenu du fait que ces mesures ont passé par le biais d'un processus cumulatif, la politique en matière de technologies japonaise est devenue plus complexe et moins transparente. Pour mettre en place un système cohérent pour cette dernière, une révision est nécessaire concernant la façon dont le gouvernement conçoit et met en œuvre ces mesures politiques.
Nouvelle tendance pour le 21ème siècle :
la construction d'un système national d'innovation exige plus qu'un ensemble de mesures individuelles. Cela implique une philosophie sur la technologie industrielle, une réforme structurelle et organisationnelle des systèmes actuels basés sur cette dernière, et une indication claire sur l'orientation politique.
Cette nouvelle philosophie consiste en premier lieu à passer du « modèle d'innovation linéaire » (apparu durant la seconde guerre mondiale : recherche fondamentale -> développement -> production -> commercialisation) au « modèle de Kline » (qui consiste a étudié les besoins du marché ensuite passé aux recherches, au design, à la production et enfin à la commercialisation, avec une présence de rétroaction entre les différentes étapes menant à des produits innovants.) ; deuxièmement à donner plus de responsabilité et d'importance au milieu universitaire qui est un acteur clé grâce à ses recherches, sa formation, et son rôle de guide vis-à-vis de la société, et troisièmement, la prestation sociale devait faire partie des critères pour la sélection des instruments politiques.
Conclusion :
Pendant les années 1950, le développement d'industries de base (le charbon, l'électricité et la sidérurgie) était la priorité. Ainsi, l'objectif de la politique en terme de technologie était avant tout d'aider les entreprises privées qui travaillaient dans ces secteurs. Dans les années 1960, tout l'effort a été concentré sur l'adaptation et l'amélioration des technologies importées et le Japon a réussi à combler le fossé technologique avec les Etats-Unis. Les années 1970 ont été dominées par l'énergie et les problèmes environnementaux et le Japon a réussi à passer d'une politique orientée vers l'industrie lourde à l'une orientée vers l'industrie de haute technologie, avec un certain intérêt à l'électroniques. La récession économique, qui a caractérisé les années 1990, était une incitation à revoir les politiques passées. Le gouvernement était attentif et réactif à toutes ces évolutions, et a proposé un certain nombre de mesures politiques individuels qui étaient loin de pouvoir construire un système d'innovation cohérent fondée sur une vision à long terme.
Par conséquent, ces cinquante dernières années ont permis au Japon d'accumuler des connaissances, non seulement au sein des universités et des laboratoires de recherche nationaux, mais aussi au sein des entreprises privées. Dans ce contexte, la redéfinition du rôle du gouvernement et la reconstruction de la politique en terme de technologie industrielle étaient en temps opportun et indispensable.
L'évolution de la politique en terme de technologie japonaise ne se limite pas à l'avancement technologique, mais il y a eu aussi des implications économiques, politiques et institutionnelles importantes.
La politique et la philosophie pour améliorer le secteur des nouvelles technologies ne vont pas s'arrêter à évoluer même si le Japon souffre à ce jour de la rude concurrence des entreprises étrangères, surtout dans le secteur de l'électronique grand public qui voit une baisse continue en terme de part de marché mondial depuis 2004. Mais il est clair que les entreprises japonaises ont encore les moyens et les capacités requises pour faire face à la concurrence à l'échelle mondiale.
Sources :
Politique de la technologie japonaise : Histoire et nouvelle perspective - HARAYAMA Yuko (RIETI : ).
Redémarrage du secteur des nouvelles technologies du Japon ().
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Modifié par saadkenshin, 24 mai 2015 - 07:25.